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Thierry-Auguste Issachar / « L’anathomie » c’est le destin ? /

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 La religion n’exigeait que le salut de notre âme. La science, elle, exige le salut de notre corps. Pire, c’est à nous-mêmes d’en assurer son intégrité ! La science ne serait-elle pas finalement qu’un avatar du culte marial, un culte du corps resté pur et intact même après la mort ? Un corps resté pure image ? « J’ai la rate qui se dilate, j’ai le foie qui est pas droit, j’ai le ventre qui se rentre, j’ai le pylore qui se colore… Ah, bon Dieu que c’est embêtant d’être toujours patraque. Ah, bon Dieu que c’est embêtant, je suis pas bien portant ». Et bien je ne suis pas sûr que cette petite chanson soit encore aujourd’hui d’actualité.. L’anatomie c’est le destin dit Freud… C’est vrai, mais c’est le pire des destins qui soit. C’est du corps qu’on cadavérise à petits feux, et ce, dès la naissance ! Corps qu’on a malheureusement laissé aux bons soins de la science puis de la médecine « anathomisante » et qui nous aura procuré des biens tels un foie, des poumons, un cœur, un cerveau, des neurones,…, biens qu’il faut aujourd’hui rendre intacts ! On ne sait jamais, on pourrait bien s’en resservir ? Artaud disait que la médecine c’était le crime organisé et légalisé… Ainsi, déclarer la guerre à la médecine revient à déclarer la guerre à une armée de saints hommes… Surtout en ce moment ! Ce n’est quand même pas banal de vouloir à tout prix guérir son prochain, fût-ce même malgré lui ? On a tous retenu la leçon de Freud sur le dogme chrétien « tu aimeras ton prochain comme toi – même »… dogme devenu aujourd’hui bien tyrannique ! Il y a près d’un siècle, Freud nous avait mis en garde ; il ne voulait surtout pas que la psychanalyse soit à la remorque de la médecine, de la psychiatrie ou de la psychologie : « les médecins fournissent à l’analyse un lot considérable de charlatans » disait-il. Pour ma part, je crois qu’on ne peut pratiquer sérieusement la psychanalyse sans avoir préalablement abdiqué d’avec la médecine. Contrairement à la médecine, la psychanalyse exclut par principe toute phénoménologie. Elle n’est justement pas une clinique du regard, une clinique spéculaire… Qui dit clinique spéculaire dit clinique purement spéculative et identificatoire ! Le psychanalyste n’a pas à faire avec du sujet, mais avec son ombre, son « ES », son « ça », soit aux traces, aux restes que ce sujet peut laisser non pas derrière lui, mais devant lui. Et c’est cela que le psychanalyste doit interpréter. L’ombre du sujet n’est pas portée, mais bien portante ! « ça » n’a justement pas de sens, mais une structure, comme si c’était un langage, soit justement un moule qui l’aura formé ! Sa vocation est de vous faire trébucher dans le langage, dans le signifiant, soit de vous attribuer des biens, des qualités pour qu’on puisse, le jour venu, mieux vous les spolier. On pourrait illustrer cette mécanique redoutable par 2 exemples : la mort n’est pas la fin de la vie, ou l’absence de vie, mais bien une privation de vie, tout comme le « penisneid » est bien une privation de pénis et non son absence. Ainsi « ça » commence toujours avec le stade du miroir. Partant du « ça », le futur sujet ne pourra fondamentalement jamais anticiper sa propre image (même si au début il en a l’illusion), image du corps « i (a) », car celle-ci le précédera toujours. Et c’est à force de vouloir l’anticiper qu’il lui arrivera bien des étrangetés, bien des symptômes justement, voire des hallucinations, ce qui génère de l’angoisse… À force d’anticiper, le sujet va s’inhiber ! Je crois que Freud a su très vite qu’il était inutile de faire parler ce symptôme, cette étrangeté, cette douleur : c’est justement « ça » qui parle, on ne va quand même pas s’en priver ! Quel serait l’intérêt de mettre des signifiants sur des signifiants ? De mettre des mots sur des mots ? En revanche, suite à son analyse de l’homme aux rats, il recommandait vivement à ses disciples de poursuivre une telle analyse… jusqu’au bout ! L’homme « aux rats », l’homme supplicié, était peut-être lui-même prisonnier de son aura ? Derrière son symptôme, se cachait peut-être le saint homme, soit justement cette pure image qu’il faudra bien un jour faire parler ? D’où la nécessité d’aller chercher du réel qui vient faire trou, blessure, griffure dans cette belle image idéalisée. Et en matière de réel, seul le psychanalyste sait y faire… c’est même son domaine dit Lacan !