ÉLisabeth Blanc – AAA aaa !!! Un cri de crise
Bernard Maris et Gilles Dorstaler (Capitalisme et pulsion de mort) montrent bien que la société de consommation est en fait une société de destruction et de gaspillage, créatrice d’objets mais aussi de déchets et de pollution. La pulsion de vie rejoint la pulsion de mort dans ce désir sans fin d’objets.
On retrouve là notre vieux Potlatch et son énigmatique destruction de richesse, en grandes quantités pour se débarrasser de la part maudite, le mana cette part intime et mystérieuse accrochée à l’objet. On donne en abondance à l’autre pour imposer son mana, son emprise, et l’autre a obligation de rendre pour s’en délivrer et obligation de rendre en plus grandes quantités encore pour ne pas être asservi. Cette fuite en avant conduit à la destruction de ces objets accumulés en pure perte.
Cette relation intime sujet/objet que l’on observe dans le mana est une des clés pour comprendre le mécanisme de l’angoisse. L’objet de l’angoisse, car l’angoisse n’est pas sans objet, ce petit a, vient se loger dans cet espace, dans l’Autre, laissé vacant pour le sujet de l’inconscient. Cet objet mystérieux vient se loger dans ce heim, (l’intime) qui n’est rien d’autre que ce vide creusé dans l’Autre, il va alors faire retour comme objet réel et se révéler à nous comme unheimlich (l’intime étrange) au moment de l’angoisse et provoquer une disparition du sujet.
Dévoilement de l’objet, disparition du sujet. Refoulement de l’objet perdu, émergence du sujet.
L’AAArgent.
La monnaie et son référent Or et Argent, était à l’origine une valeur chargée d’effacer justement l’effet d’impact personnel et affectif de l’objet dans les échanges (le mana) et chargée de représenter la place vide.
Mais l’argent va devenir objet et objet de jouissance des adultes, l’argent comme le rappelle Freud ne fait pas partie des désirs infantiles, mais il devient pour l’adulte l’équivalent de l’excrément pour l’enfant, l’adulte va « faire de l’argent ».
A noter en passant que le don de l’objet : ce que demande la mère à l’enfant c’est la propreté, c’est-à-dire la perte de l’objet. L’objet est de toute façon déjà perdu. L’enfant lui montre ses excréments dans le pot pour les lui donner mais la mère l’accepte à condition de les jeter pour lui demander qu’il accepte de s’en séparer, par amour l’enfant lui donne cette perte et la mère accepte cette perte pour elle aussi.
Mais l’enfant puis l’adulte névrosé refuse d’accepter cette perte, il peut la sublimer dans une production artistique par exemple mais il peut aussi rester attaché à cet objet comme objet de jouissance, par la rétention de l’objet, voire la collection d’objets.